Des
thématiques qui traversent la filmographie du désormais oscarisé Bong Joon-ho
(la lutte des classes, la marginalité, les contrastes sociaux), l’une d’entre
elles porte en elle une profondeur bien plus complexe qu’un simple prétexte
symbolique : c’est la question incertaine et plurielle des mutations.
Physique ? Sociétale ? Intime ? C’est un peu de tout ça, à
chaque film : le changement d’échelle d’un cochon géant, l’élévation
sociale, la pollution, l’imposture – avec, en parallèle, la violence comme inhérente
à ce déplacement d’état. Memories of
Murder, peut-être la plus pertinente représentation de ce qu’on pourrait
appeler, chez Bong, une « allégorie
rampante », en est une illustration scolaire : une série
d’oppositions (des espaces, des personnages, des époques) et donc un terrain de
transition, entre-deux cinématographique qui sert de décor au film.
C’est
cette notion d’espace qui est le premier outil de Bong quand il oppose, quand
il lie, quand il raconte. Un train, une maison, un fleuve – dans Memories of Murder, l’espace est moins certain, déjà parce
qu’il n’est pas une matérialisation de statut. Le ciment spatial de Memories of Murder est plus
impalpable ; il est tout et il n’est en même temps rien : une ville
qu’on ne voit jamais et dont ne saura pas vraiment la taille, des champs à la
géographie anarchique, une mine qui nous apparaît comme un twist visuel
redéfinitoire.
C’est
peut-être là la force tragique du cinéma de Bong Joon-ho : il donne à ces
lieux une nature panoptique, kafkaienne, déterministe – le seul sens, c’est
celui, indicible, d’une contemporanéité tentaculaire, qui fait des normes le
germe du déterminisme, qui fait des destins des fatalités. La seule
échappatoire, presque inhérente à un certain cinéma coréen à succès, c’est la violence
immesurée, primitive, celle de la rage d’un homme face à un mur, face à l’obscurité,
face à un tunnel, celui de l’injustice sociale. Ne demeure alors que la
vengeance, sanglante, seule donnée incalculable de l’intraitable mathématique
du chaos.
L’espace
total de
Memories of Murder,
croisement de ce non-monde sans repère et de cette idée abstraite d’une inexorable
chute des statuts, c’est finalement le temps : espace infini mais inévitable
par définition – ce temps qu’on ne peut détourner, ce temps duquel on ne peut
fuir, ce temps qu’on ne peut pas résoudre.
Memories of Murder est une course contre la montre où poursuivis et
poursuivants se confondent – certains chassent le temps pendant que d’autres
tentent d’y échapper. Seule certitude : l’évidence est un piège, les
différences sont un carrefour, les secondes sont des coups de poignard. Il n’y
a pas de route, seulement d’infinis chemins de campagne.
Je ne mets rien en lecture sans un certain plaisir. Le cinéma https://coflix.stream/3893-hopper-et-le-hamster-des-tenebres-hd-3d.html est un lieu d'utilité et d'apprentissage de la vie.
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