La
baisse de qualité récente des productions Pixar s’est faite en parallèle d’une
hausse inattendue de celle des réalisations de la maison-mère Disney. Là où Rebelle, Le Voyage d’Arlo, Le Monde de
Dory, Monstres Academy ou encore
les suites de Cars avaient pu
décevoir (sans qu’il s’agisse pour autant de catastrophes), les classiques
d’animations Walt Disney ont su, eux, regagner le cœur du public après un
passage à vide dans les années 2000. Si le très solide Vice-Versa avait pu redonner un peu d’espoir dans le studio à la
lampe de bureau, la flopée de suites à venir (Les Indestructibles 2, Toy
Story 4, Cars 3) ne laissaient
pas présager un regain d’originalité de la part de la boîte qui était, il y a
encore dix ans, le fleuron qualitatif incontesté de l’animation américaine. On
n’avait en tout cas pas revu Lee Unkrich à la tête d’un projet depuis
l’exceptionnel Toy Story 3 :
avec un nom pareil sur l’affiche, Coco
avait la lourde de tâche de redorer un blason qui s’était bien trop terni
depuis quelques années.
Il y
a depuis longtemps, chez Disney et ses studios affiliés, une tradition de s’approprier
des cultures, des figures et des éléments de folklores étrangers aux Etats-Unis
pour leurs réalisations. Symbole évident de l’universalité de leurs films d’animations :
de la Chine (Mulan) à la Polynésie (Vaiana), en passant par l’Inde (Le Livre de la Jungle), cela est
cependant assez rare que ceux-ci ne s’aventurent au sud de la frontera séparant États-Unis et Mexique (à part Kuzco, il n’y a bien que le cas
particulier de la médiation culturelle opérée par Saludos Amigos et Les Trois
Caballeros, destinée à rapprocher les peuples des Amériques pendant la
seconde guerre mondiale). Alors qu’un tout nouveau président (au prénom d’ailleurs
assez familier pour Disney) ne menace de construire un mur pour définitivement séparer
ces deux peuples, il semblait important que Pixar ne décide de voler les
chaussures diplomatiques du vieux Walt pour essayer de montrer, qu’au final, la
culture mexicaine ne se résume pas à l’immigration, aux cartels et à la
tequila. Si ce n’est, bien entendu, pas l’ambition première de Coco que de prendre Trump à contre-pied
(le projet date de 2010), il y a beaucoup à retenir dans le respect et la
passion avec lequel le dernier Pixar entreprend de représenter la culture
mexicaine.
En
prenant comme pivot thématique et temporel le Jour des morts (ou « día
de los muertos » comme les personnages s’y réfèrent pendant tout le
film), Coco se pourvoit instantanément
de questionnements sur la mort, la mortalité, le deuil et l’oubli, réflexions
qui étaient déjà centrales dans Le Monde
de Nemo et dans Là-haut. Des
thèmes difficiles à traiter lorsque l’on s’adresse aux plus jeunes, car il est
difficile de ne pas tomber dans l’expérience traumatisante (Le Petit Dinosaure et la Vallée des
merveilles, Le Tombeau des Lucioles).
Coco, pourtant, a trouvé la bonne
corde.
Dans
la plupart des classiques d’animation Disney, la musique est un bonus – elle ne
sert pas l’intrigue, elle ne fait pas évoluer les personnages, elle ne fait que
vaguement réexpliquer leurs motivations ou les ressorts du récit afin de ne pas
trop ennuyer les enfants en leur lançant brutalement à la tête des chansonnettes
entraînantes. Coco ne fait pas la
même chose : ici la musique est un moteur narratif, elle est une
intention, une passion, une nécessité. Elle le cœur du film, le cœur d’une
culture – sans elle, Coco n’existe
pas : certains personnages essaieront de la stopper, mais elle est inarrêtable,
elle seule peut toucher les étoiles.
Ce n’est
pas un hasard que Coco soit la
meilleure production Pixar depuis le début de la décennie : comme les
meilleurs films du studio, elle redonne ses lettres de noblesse au mélodrame le
plus pur, à la fois doux et cruel, à la fois drôle et larmoyant. Unkrich ne s’interdit
pas l’élégance d’un humour noir tant visuel que scénaristique, saupoudrant un
récit très linéaire mais d’une maîtrise et d’une finesse devenue rarissimes dans
le cinéma hollywoodien. Un récit qui sait passer de la poésie à l’action et du
rire aux larmes avec une aisance incroyable. Loin des Avengers et des autres superproductions superhéroïques, Coco interroge ses héros, ses
fondements, ses croyances. Il sait trouver la beauté dans le marginal, dans l’original,
dans l’objet de moqueries et de désintérêt. Tous ses personnages apprennent d’eux-mêmes,
et c’est là l’incroyable maturité de son propos : rien n’est écrit dans le
marbre, même pas les lettres gravées d’une pierre tombale. Visuellement, c’est
sublime ; musicalement, c’est à pleurer ; mais Coco c’est aussi une histoire. Une histoire de rêves, de regrets,
de trahisons, de rancunes, de modèles, de famille et de música. Qui a parlé de mort ?
il y aura une fête pour les enfants. Quand ils auront une session sur le week-end et pendant deux journées entières à regarder https://fullstream.plus inséparablement.
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