L'été est ici le carburant de la dérive sociale. Les esprits s'échauffent, les corps transpirent, les tensions naissent de simples regards. L'été de Spike Lee, c'est celui d'un monde qui s'embrase. Un feu de forêt en plein centre urbain, mais sans pompiers et sans canadairs. Do The Right Thing et Summer of Sam résument la grande histoire de l'Amérique, celle d'un dialogue de sourds et d'une bataille d'aveugles chevronnés. Il n'est jamais question, dans les films de Lee, de valoriser la position d'un parti ou d'un autre, mais plutôt de dépeindre la fumée étouffante de ce brasier, qui asphyxie tout un pays, toute une population.
Do The Right Thing sort trois ans avant les émeutes de Los Angeles, survenues à la suite de l'affaire Rodney King. D'une certaine façon, on pouvait déjà y entendre un cri de douleur, y lire un appel à l'aide. Spike Lee n'est pas un prophète, mais il comprend ces rues, il sait représenter ces abandonnés de la société. Les polémiques le taxeront de communautariste radical, notamment autour de la définition de the right thing to do (la chose qu'il faut faire). La controverse n'est pas sans fondement, Lee n'est pas très clair dans la morale de son film. En témoigne les textes finaux, citant Martin Luther King et Malcolm X, incitant dans le même temps à la paix, et à la lutte violente.
C'est une contradiction qui peut déranger, elle n'est pourtant pas si naïve. Lee incite à la révolution, et il semble penser que la meilleure solution ce n'est ni la passivité de King, ni l'agressivité de Malcolm X, mais une rencontre de ces deux visions du monde, mesurée, adaptée. Répondre au bâton par le bâton, ne pas tendre l'autre joue, mais ne pas non plus devenir l'oppresseur. Il y a matière à débat, il y a matière à combat : Do The Right Thing c'est de l'huile sur le feu, c'est de la crème solaire qu'on retire. Summer of Sam, prolongement idéologique de cette étude d'une tolérance à conditions, en est finalement la seconde partie indispensable.
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