Un commencement, vous dites ? Même si
ce sous-titre est l’œuvre de la distribution française, il est cependant
évident que Warcraft n’a jamais caché
ses ambitions de faire de la célèbre franchise vidéoludique de Blizzard un
produit grand public qui pourrait être regardé sans connaissance préalable de l’univers
du film. Premier objectif raté : Warcraft
– Le Commencement (puisqu’il s’agit du potentiel premier volet d’une saga
cinématographique) est un produit d’initiés. Contrairement à ce qu’avait su
réaliser Peter Jackson avec la Terre du Milieu, Duncan Jones et ses scénaristes
peinent dans un premier temps à établir les ressorts du monde qu’ils
dépeignent. Du name-dropping à
tout-va, des personnages introduits très rapidement, un récit maladroitement
construit… Novices, accrochez-vous, car Warcraft
fait d’un geste compliqué ce qu’il aurait pu faire simplement.
C’est
bien là la plus grande faille du film : son scénario. Non le fait qu’il
soit classique, puisqu’il ne l’est pas vraiment, s’extirpant assez habilement
du carcan tolkienien ; non plus le fait qu’il soit sage, puisqu’il
parvient à dresser d’intéressantes réflexions sur le nationalisme, la
xénophobie et le choc des civilisations – un sujet qui, en ces temps d’immigration
à grande échelle depuis les zones de guerre, possède un écho certain.
Le
problème de Warcraft, c’est qu’il ne
sait pas raconter une histoire. Le temps de définir les personnages n’est
jamais pris, leurs origines effleurées, leurs motivations évoquées une fois sur
deux. Tout va trop vite, l’intrigue n’a pas le temps d’amorcer ses enjeux qu’on
en est au dernier acte. On a d’ailleurs appris, en marge de la sortie du film,
que pas moins de quarante minutes avaient été coupées avant sa sortie en salles :
faut-il voir dans ce storytelling catastrophique un charcutage économique ?
Reste que l’œuvre que l’on nous offre est telle qu’elle est actuellement, et qu’il
est trop tard pour chercher des excuses.
C’est
d’autant plus dommage que, bien loin du naufrage visuel annoncé, Warcraft est plutôt joli à regarder. La
bouillie numérique y trouve une sorte d’apogée, un opéra kitsch qui, avec ses
costumes over-the-top et ses mages hippies, rappellerait presque Excalibur de John Boorman. Le rendu des
orques est par ailleurs troublant de réalisme, notamment dans la vivacité de
leurs regards.
Ces
quelques qualités ne peuvent rattraper le manque de pédagogie de Warcraft. Les thèmes sont intéressants,
le scénario aurait pu l’être, mais le résultat final n’est rien de plus qu’un
brouillon frustrant qui parvient tout juste à éviter la catastrophe. Cela-dit,
on en attendait Le Septième Fils,
aura eu Le Prince Caspian. De la
fantasy du dimanche soir, mais cela est si rare qu’il est difficile de faire la
fine bouche : ce n’est ni follement épique, ni vraiment engageant, mais le
divertissement est (plus ou moins) là.
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