THE WALK (2015)
RÉALISÉ PAR ROBERT ZEMECKIS
AVEC JOSEPH GORDON-LEVITT, CHARLOTTE LE BON, BEN KINGSLEY
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Alors
que Joe Dante, Frank Marshall ou même Chris Columbus ont fini par se perdre
dans les limbes d’Hollywood (quand ils ne sont pas encore là pour nous offrir
des immondices à l’image du récent Pixels),
la carrière de Zemeckis, l’enfant prodige de la famille Spielberg, reste
toujours aussi passionnante à suivre. Non seulement parce que sa filmographie
regorge de certaines des plus grandes merveilles de l’académisme du Nouvel
Hollywood, mais aussi par l’étude de ses obsessions – qu’il s’agisse de
marginaux magnifiques à la Forrest Gump, ou de ses expérimentations techniques,
illustrées par ses trois essais remarqués à la motion capture dans les années
2000 par l’intermédiaire de sa société ImageMovers.
Faute
d’avoir rencontré le succès dans ce domaine, c’était déjà un retour à un cinéma
traditionnel que Zemeckis opérait avec Flight
il y a deux ans. Il ne faut pourtant pas voir cette marche arrière comme un
abandon de ses ambitions créatives, The
Walk en est la preuve ultime. C’est quelque chose qui est de plus en plus
rare, et c’est ce qui fait toute sa singularité, mais il y a dans l’utilisation
des CGI faite par Zemeckis une sensibilité numérique unique, comme si cette
imagerie par ordinateur était érigée au rang d’un Art visuel vertigineux,
écrasant, et aussi étrange que cela puisse paraître, mélancolique. C’est une
piste difficile à percevoir pendant la très longue introduction du film – une origin story pas inintéressante mais qui
manque d’exubérance – mais elle prend tout son sens dans sa deuxième partie :
à partir de l’arrivée de ses personnages à New York, The Walk prend son envol.
Le film
de Zemeckis n’est pas seulement une expérience à couper le souffle, il est
aussi un tour de force pictural incroyablement maîtrisé. Le cinéaste sait
ménager ses effets, il sait composer la couleur de ses cadres, iconiser son
décor et ses acteurs. L’image fantomatique, quasi irréelle, des tours jumelles
ne fait qu’ajouter à la profonde mythologie du long-métrage. C’est une poésie
de l’émerveillement que Zemeckis s’est développé, une voix qui apparaît plus
particulière que jamais dans un contexte où la débauche a substitué la
sophistication – il est aujourd’hui difficile de convaincre un spectateur
américain de se déplacer en salles si la bande-annonce du film qu’il va voir ne
compte pas un minimum de trois money
shots : un français qui fait le clown sur un câble ? Ce n’est
guère surprenant que ce soit un four au box-office.
On
ne peut que regretter la disparition progressive de ces grosses productions qui
savent rêver et faire rêver – The Walk
n’est pourtant pas le meilleur des Zemeckis, l’écriture paresseuse du destin de
son protagoniste n’est qu’un indice parmi tant d’autres que le scénario était clairement
perfectible ; mais il y a, bien au-dessus de ces quelques défauts
regrettables, l’image forte d’une mise en abyme saisissante. Zemeckis qui, tel
un funambule, réalise devant une audience réduite son tour de magie en
solitaire. Il est passionné et sa performance est féérique, mais surtout, il ne
ment pas au spectateur ; car comme on ne peut mentir sur scène, on ne peut
mentir au cinéma. Le talent, ça ne s’invente pas.
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