UNE QUESTION DE VIE OU DE MORT (1946)
RÉALISÉ PAR MICHAEL POWELL & EMERIC PRESSBURGER
AVEC DAVID NIVEN, KIM HUNTER, ROBERT COOTE
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Les
films de commande ont toujours tendance à être inquiétants : tout se joue
sur la manière dont l’auteur a pu épouser les obligations et les limites qui
lui étaient imposées. Alors forcément, quand le tandem des Archers composé de
Michael Powell et d’Emeric Pressburger, deux des metteurs en scène les plus
influents du cinéma britannique d’après-guerre, s’applique à la réalisation
d’une demande du gouvernement visant à apaiser les tensions entre soldats
anglais et américains sur le territoire récemment occupé, une étincelle de
curiosité jaillit dans l’ombre de la propagande bête et méchante.
On n’oublie
pourtant pas l’ambition originale du film : de cet objectif bien
intentionné, le duo de cinéastes en fait un enjeu artistique. Dans le monde d’Une question de vie ou de mort, il n’y a
qu’espoir et positivisme, heureux hasards et romances fantasmées. Après six
années du conflit humain le plus meurtrier de l’histoire, Une question de vie ou de mort est une réponse pleine de vie à
l’horreur du monde. De l’utilisation d’un Technicolor flamboyant à l’écriture
d’une aventure certes un peu niaise, mais fondamentalement généreuse.
C’est
cette passion inébranlable pour l’homme, mais aussi pour le cinéma, qui fait du
film de Powell et Pressburger une œuvre si vivante et chatoyante. Jamais
radical, jamais réellement novateur, Une
question de vie de mort est un récit doux et grandiose, illuminé par la
beauté désuète de ses effets spéciaux, à l’image de cette représentation
magnifique de l’Au-delà, environnement biblique aux couleurs si fabuleuses que
même la pellicule ne peut les transmettre correctement.
L’anti-cynisme
à son paroxysme, la sincérité cinématographique à l’état pure, libérée de toute
considération mercantile et de tout engagement politique : Une question de vie ou de mort est un
pur produit rêvé, pourtant bien loin de faire dans la facilité diégétique,
porteur d’un message fort qu’il est nécessaire de contextualiser pour en saisir
le cadre.
Les
plus désabusés des spectateurs n’y verront qu’un concentré indigeste de
personnages superficiels évoluant dans une utopie sociale candide. Pour ceux
qui auront le courage d’oublier, le temps d’un film, la noirceur du monde,
peut-être que la singularité – soixante-dix ans plus tard – d’un récit porté
par l’amour, l’espoir et la justice saura avoir raison d’eux, le tout se
concluant sur une note des plus ambiguës, porte d’entrée à une réflexion plus
profonde sur les maux de la guerre. Passionné et passionnant.
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