LE SECRET DES POIGNARDS VOLANTS (2004)
RÉALISÉ PAR ZHANG YIMOU
AVEC TAKESHI KANESHIRO, ANDY LAU, ZHANG ZIYI
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Avec
sa filmographie regorgeant de fresques historiques en tous genres, ce n’est
guère étonnant que Zhang Yimou se soit essayé plus d’une fois au wu xia pian.
Arrivant deux ans après le succès de Hero
(et quatre ans après Tigre et Dragon
qui avait permis à l’époque la popularisation du genre à l’international), Le Secret des poignards volants utilise une
base historique un peu floue pour servir un mélodrame classique vaguement
justifié par des scènes d’action parsemées ici et là.
Car
il faut le rappeler : Zhang Yimou n’est pas un réalisateur dit d’action, il n’est pas Tsui Hark. Non, Zhang
aime les mélos bien mielleux et il faut dire qu’il y excelle, car il sait
filmer ses personnages, s’immiscer dans leur intimité, s’absorber de leurs
questionnements. Et ce principalement quand ils sont interprétés par Gong Li.
Gangréné par ses scènes d’arts martiaux à rallonge (pourtant très peu
nombreuses), Le Secret des poignards
volants ne prend malheureusement pas le temps de présenter ses
protagonistes, qui se révèlent par à-coups à force de twists pas vraiment bien
amenés. Zhang se délecte des motivations simples, elles sont ici très vides, et
cette absence d’enjeux renouvelés finit par fatalement ennuyer.
Zhang
Yimou ne sait pas bien capter le mouvement. Dans une tentative de pastiche un
peu facile, il s’essaie à l’exagération, mais la magie ne prend pas. Difficile
d’être crédible dans une telle démarche quand le réalisateur se limite à l’utilisation
excessive de ralentis mal placés et d’un montage épileptique répétitif de plans
clonés. Mais malgré cette caméra facile, impossible de nier que Le Secret des poignards volants dispose
d’une direction artistique des plus raffinées : la photographie poétique,
la majesté des décors et l’excellente bande-originale n’auront pas fini d’hanter
le plus frigide des observateurs. Il faut attendre le générique de fin pour
réaliser que non, ce n’était pas la Chine, mais bel et bien l’Ukraine qui a
servi au tournage du film.
La
couleur est une composante essentielle du cinéma de Zhang et du wu xia pian, et
c’est au final le seul point d’entente de cette rencontre fortuite. Au-delà de
ces caractéristiques picturales admirables, ni la sensibilité du cinéaste chinois,
ni le souffle épique de ce genre éculé n’arrivent à faire effet, et c’est l’impression
d’assister à l’essai inopiné d’un réalisateur de s’approprier des codes qu’il
ne semble pas avoir compris qui prend finalement le dessus. Car oui, Zhang
confond mouvement de l’image et mouvement du cadre. Dans le traditionnel wu xia
pian, même si les personnages défient les lois les plus essentielles de la physique,
le trajet de la caméra demeure crédible. Chose que Zhang n’applique pas, et la
nausée se substitue à l’émerveillement.
Le Secret des poignards volants aurait
pu être une expérimentation passionnante, le renouvellement d’un genre non pas
par la forme, mais dans le fond. Zhang avait les cartes en main pour émouvoir,
pour transcender des archétypes déjà connus. Il n’en est pourtant rien. Parfois
ringard, souvent approximatif, et indéniablement ennuyant. Il n’y a bien que
son esthétique fabuleuse qui sauve le film du naufrage total. On lui préférera
ses glorieux aînés.
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