Parfois
la réalité est encore plus inventive que la fiction. The Jinx, c’est un peu ça. Nouvelle réalisation d’Andrew Jarecki,
auteur de Capturing the Friedmans,
autre documentaire sur un fait divers criminel, The Jinx s’intéresse au milliardaire Robert Durst et aux affaires
auxquelles il a été mêlé. Il ne vaut mieux pas en savoir plus, car là est la
grande réussite de la mini-série de Jarecki : tout cela est vrai et
pourtant aucun scénariste n’aurait jamais osé écrire une histoire aussi
abracadabrante, constellée de rebondissements, de retournements de situation,
de bouleversements incompréhensibles mais répondant pourtant à une cohérence
macabre implacable.
On
pense bien sûr à The Staircase de
Jean-Xavier de Lestrade, qui malgré des différences de forme, invoque beaucoup
de ressemblances avec The Jinx. Mais
il y a quelque chose de plus dans la mini-série de HBO, sans doute est-ce cette
galerie de personnages mystérieux et insondables, qui ne semblent répondre qu’à
leur propre logique, à commencer par Robert Durst. Chaque phrase semble regorger
de sens, chaque mot laisse place à de nombreuses interprétations, chaque silence,
chaque geste ou battement de paupière en dit plus qu’une savante démonstration.
Au
travers de cette remise en question à peine camouflée du système judiciaire
américain, Jarecki dresse le portrait d’un homme. D’un homme pas comme les
autres, dérangeant, terrifiant, d’une intelligence hors normes et surtout
profondément ambiguë : Robert Durst. Les pièces du puzzle s’assemblent peu
à peu, on plonge petit à petit dans sa vie, dans celle de ses proches, et
pourtant, on ne le comprend toujours pas. Pourquoi dit-il cela ? Pourquoi
fait-il cela ? Est-il coupable ? Innocent ? Plutôt que de nous
répondre, Jarecki nous donne des pistes, et même si The Jinx invite au questionnement, impossible de trouver des
réponses.
Toutes
les cordes se croisent et se superposent, des nouveaux indices viennent s’ajouter
à d’anciens, et entre coupable idéal et innocent malchanceux, on n’arrive pas à
choisir : Robert Durst demeure une énigme. Ce n’est pas seulement génial,
c’est passionnant. Construction exemplaire du récit, montée en puissance
incroyable, réflexions pertinentes sur la lutte sociale et les limites de la
justice, générique fabuleux, choix de mise en scène admirables : The Jinx est une réussite incroyable, un
petit chef d’œuvre qui se vit autant qu’il s’apprécie. On finit bouche bée,
en-dessous de ce nuages d’incertitudes, de questions sans réponses, et surtout
avec la profonde impression d’avoir assisté à quelque chose de grand. Quelque
chose de très grand. Car en plus de résonner dans l’actualité – Robert Durst s’est
fait (encore) arrêté hier, The Jinx
nous pose une question cruciale : quand tous sont dans le doute, à qui
peut-on bien faire confiance ?
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