Une
saison de House of Cards semble
ressembler à chaque fois à une nouvelle épreuve pour Frank Underwood, un
nouveau niveau comme si lui-même
évoluait dans un jeu vidéo – medium qui possède une place étonnement importante
dans ce troisième crû de la série de Beau Willimon. Ainsi, après une deuxième
saison plutôt insupportable dans ses intrigues superflues inintéressantes et
son aspect décalqué de ce qui avait fait le succès de la série l’année
précédente, on retrouve pour la troisième fois Frank et Claire pour treize
épisodes de politique de comptoir, de scènes faussement subversives et de
meurtres gratuits.
Quoi ?
Il n’y a rien de tout ça ? Et c’est effectivement là la (bonne) surprise
des premiers épisodes – puis des suivants : étonnement sobre, soulagé de
ses effets lourdingues (principalement le franchissement du quatrième mur, très
peu utilisé cette année) et de ses twists improbables, House of Cards renaît de ses cendres. Même la mise en scène
retrouve des couleurs : de vraies idées de cadrage, des plans à tomber par
terre, un professionnalisme jusque dans les plus discrets détails. Mais qu’est-ce
que peut donc nous raconter House of
Cards pendant qu’elle ne passe pas son temps à montrer en large et en
travers la monstruosité de Frank Underwood ? C’est bien simple : pour
la première fois, la série de Netflix semble enfin mériter son étiquette de « show politique » (notons les
guillemets). Boucherie de pouvoir sur fond de réforme sociale, Nouvelle Guerre
Froide en arrière-plan de tensions géopolitiques, analyse sociétale à la base d’un
couple en crise. House of Cards
propose des sous-textes très intéressants, figurant les questionnements du
paradigme mondial, s’intéressant autant à la hausse du chômage qu’au régime poutiniste,
des droits des femmes jusqu’à ceux des homosexuels, de la guerre israélo-palestinienne
jusqu’au rôle bâtard des Etats-Unis dans le bloc occidental. Cette réussite est
à incomber en partie au personnage de Petrov : version Willimon de
Poutine, il est aussi ambiguë que passionnant, et les épisodes où il apparaît
se classent parmi les meilleurs de la saison.
Il y
a toujours des ombres au tableau : tout ce qui tourne autour de Doug fait
vraiment tâche et s’inscrit dans une continuité inutile de la deuxième saison.
Heureusement que ces arcs narratifs ne composent qu’une petite partie de ces
treize épisodes – malgré que le (médiocre) final se focalise dessus. C’est
aussi dans le manque de subtilité de l’écriture du couple phare de la série qu’on
peut trouver des erreurs de traitement : pas très crédibles, pas très
cohérents – ou en tout cas trop opaques pour l’être. Car il faut le dire :
si Frank Underwood était plutôt jouissif au départ, on semble avoir fait le
tour du bonhomme depuis longtemps.
House of Cards est toujours et encore un
peu surévaluée, mais cette saison 3 revient combler le fossé creusé par l’acte
de l’an dernier. D’excellents choix, une écriture passionnante, une mise en
scène très réussie, un Lars Mikkelsen démentiel, une bande-originale plus
complète que jamais et une portée politique bien pensée. C’est toujours aussi
vulgaire sur certains aspects mais la série parvient à passer outre.
Soulagement.
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