Réalisé par David Gordon Green (2014)
Avec Nicolas Cage, Tye Sheridan, Adriene Mishler
Nicolas Cage est devenu depuis
une dizaine d’années la tête à claques des cinéphiles. Ayant travaillé dans les
années 80 et 90 avec les plus grands (de son oncle Francis Ford Coppola à David
Lynch, en passant par John Woo, Brian De Palma et les frères Coen), le passage
aux années 2000 aura été très difficile pour l’acteur aux mille et une coupes
de cheveux : malgré quelques réussites indéniables (Lord of War, Bad Lieutenant,
The Weather Man), il n’a fait qu’enchaîner
des navets tous plus irregardables les uns que les autres (Ghost Rider, Le Pacte, Benjamin Gates et autres séries B d’action
aussi profondes qu’une interview de l’équipe de France). Après des années d’échecs
consécutifs, Joe sonne comme une résurrection.
Et pas seulement pour Nicolas Cage. A la réalisation, David Gordon Green, l’un
des porte-étendards du cinéma indépendant US au début des années 2000 (George Washington, Snow Angels, Undertow)
qui, après sa rencontre avec la Team Apatow, s’était tourné vers la comédie
grasse et vulgaire, entre autre avec ses collaborations fréquentes avec Danny
McBride sur des œuvres aussi subtiles que Délire
Express, Votre Majesté et surtout
la série HBO Kenny Powers.
Joe c’est la rencontre de ces deux hommes : un has-been
dépassé et un touche-à-tout qui revient aux sources. Le film raconte l’histoire
d’un ex-taulard qui se lie d’amitié avec un ado en perte de repères. On pense à
Mud, de Jeff Nichols, sorti l’an
dernier, mais le Texas profond sonne différemment des rives du Mississippi. Joe est un film sale, violent, dans sa
mise en scène et dans sa narration. On pourra reprocher à Gordon Green d’oublier
parfois la subtilité au profit d’émotions assez simples et de scènes dont les
fins sont vite définies, le scénario étant à cette image relativement
prévisible. Mais le réalisateur sait filmer le Texas, comme il l’a déjà prouvé
maintes fois au cours de sa carrière (et encore récemment dans Prince of Texas).
Cependant l’intérêt de Joe ne se situe pas ici : c’est un
film d’acteurs. Deux têtes d’affiche : à ma droite Nicolas Cage, à ma
gauche Tye Sheridan, qui crevait déjà l’écran dans Mud et The Tree of Life. Les
deux sont incroyables et portent le film sur leur bras, deux performances
énormes qui méritent à elles seules de voir le film, qui sans eux n’aurait pas
eu la même saveur.
A défaut d’être un indispensable,
Joe c’est une curiosité à tenter.
Voir Nicolas Cage dans un véritable rôle de composition, c’est pas tous les ans
qu’on voit ça, de même qu’un film sérieux de la part de David Gordon Green. Joe est un film imparfait, dont on
aurait été en droit d’attendre davantage, mais la mise en scène brutale et les
performances réussies des interprètes principaux nous permettent d’espérer un
avenir radieux pour les différents intervenants du film. Joe c’est un film d’un profond pessimisme, mais qui nous permet
paradoxalement d’espérer au-delà de son statut d’œuvre : les belles
histoires à Hollywood ça existe encore.
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