Si le cinéma cubain s'est plutôt développé au départ (début du XXème siècle), il décline fortement après la Première Guerre Mondiale. C'est la Révolution Cubaine qui permet au 7ème Art de production locale de revenir au premier plan. Des films de propagande, certes, mais un cinéma novateur qui permettra à de nombreux cinéastes soviétiques de s'intéresser à l'île (dont Kalatozov, dont nous allons parler aujourd'hui). Depuis trente ans, le cinéma cubain est pourtant à nouveau sur la pente descendante, malgré quelques productions réussies (Guantanamera ou encore Viva Cuba).
LE FILM
Le plus amusant avec Soy Cuba, c'est que le film était complètement tombé dans l'oubli. Quelques années après sa Palme d'Or pour Quand passent les cigognes, Mikhaïl Kalatozov réalise Soy Cuba, peinture en quatre histoires de la révolution cubaine. Mal accueilli à l'époque de sa sortie par les spectateurs cubains et soviétiques, le dit-film tombe dans l'oubli total et plus personne n'en entend parler jusqu'en 1993, trente ans après sa sortie, année où il est présenté au Festival de San Francisco. Depuis, Soy Cuba est entré au panthéon du cinéma soviétique. Pour faire court, le film présente quatre histoires indépendantes qui montrent l'évolution du peuple cubain vis à vis de la dictature dans laquelle ils vivaient - jusqu'à la révolution.
On m'avait longtemps venté la mise en scène de Kalatozov. Visiblement le bonhomme est très amateur de plan-séquences - de part sa collaboration avec le chef opérateur Sergueï Ouroussevski. Soy Cuba ça veut dire Je suis cuba - et le film est à peu près ça : un portrait du pays dans les années 50 et au début des années 60. Derrière l'image paradisiaque que cache l'île (comme le montre le générique) existe un régime dictatoriale, de la misère et le méchant capitaliste américain. Soy Cuba a beau être tout sauf manichéen - on a d'un côté les méchants américains avides d'argent, de femmes et de pouvoir, et de l'autre les ouvriers et paysans exploités. Un fond véritablement engagé, mais c'était prévisible de la part d'un film soviétique de l'époque - et si on s'arrêtait là, je suis certain que Soy Cuba n'aurait marqué personne. Parce qu'en plus du fond, il y a une forme, et c'est là que le film de Kalatozov impressionne : il a trente d'avance. C'est magnifique, ambitieux, époustouflant de bout en bout. Un véritable chef d'oeuvre de mise en scène, c'est un plaisir de tous les instants. Chaque plan est un tableau, une photographie magnifique, un sens du mouvement qu'on ne reverra au cinéma que des décennies plus tard.
Soy Cuba c'est un classique oublié, une véritable révolution qui mériterait d'être classé au rang d'incontournable. Incarné par des acteurs incroyables, contant parmi les plans-séquence les plus magnifiques qu'on ait jamais vu - un énorme chef d'oeuvre dont la voix off résonne encore dans ma tête. Je commence à manquer de superlatifs, donc je vais m'arrêter là - si vous ne l'avez pas, vous savez ce qui vous reste à faire.
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