1945, le Japon est touché par deux bombes nucléaires américaines qui font près de deux cent cinquante mille morts, dont la quasi-totalité étaient des civils. Akira traite indirectement des conséquences de ce massacre, prenant place dans le futur, à la suite d'une guerre ayant fait des milliers de morts. Entre véritable allégorie de la bombe nucléaire à travers Akira, véritable critique de la toute-puissance américaine et cri désespéré de la condition japonaise de l'époque, une oeuvre d'une violence à peine mesurable et d'une force gigantesque.
Si le chara design a un peu vieilli, il dégage une sorte de nostalgie difficilement saisissable, contribuant à la "saleté" du film mais aussi à ses accents rétro absolument remarquables. Akira c'est beau à regarder, mais aussi magnifique à écouter : la qualité des doubleurs, mais aussi et surtout la bande-originale absolument magistrale du génie qu'est Tsutomu Ohashi - et il est certain que le film n'aurait pas été la même chose si la musique n'avait pas été là, soulignant d'autant plus ses moments de gloire, donnant au tout une grâce épique unique. Le tout rythmé sur l'histoire forte du manga d'Ôtomo.
Mais plus que sur ses indéniables qualités techniques, pour s'intéresser au succès d'Akira dans le monde occidental, il faut revenir au contexte de l'époque : la japanimation n'étaient pour beaucoup que ce qu'elle était présentée au Club Dorothée - censurée, biaisée, critiquée. L'arrivée d'Akira dans les salles françaises sera d'abord relativement discrète, malgré que le film ait rapidement regroupé un cercle d'admirateurs, mais c'est dans les années qui suivirent que le film obtiendra la gloire qu'on lui connaît : aucune censure, sur une oeuvre criante d'intelligence et porteur d'un message fort, mais aussi d'une violence comme peu en avait déjà vu dans un dessin-animé. C'était une libération, le pivot d'un genre qui participera à la création d'un véritable cercle d'admirateurs, et qui encore aujourd'hui inspire.
L'image de la moto rouge, de Neo-Tokyo, des métamorphoses de Tetsuo... tant de moments qui font figure de symboles cultes aujourd'hui, même si l'on a pas vu le film. Parce que plus encore d'avoir réalisé l'un des plus grands chef d'oeuvre de l'animation japonaise, Ôtomo a su en faire un objet de culte, jouant beaucoup avec la sensorialité du spectateur, à travers à la fois des scènes d'une rare beauté et des images qui marquent. Pour ceux qui ne l'auraient pas découvert au cinéma, il est évident que leur rêve est de pouvoir regarder un jour Akira dans une salle de cinéma, tant la majesté du final doit être à classer parmi les expériences les plus bouleversantes à vivre dans ces conditions.
Et pourtant, le film a ses détracteurs. A sa sortie, bien sur, notamment dans les rangs des habituels "casseurs" de la japanime, mais encore aujourd'hui, même chez des amateurs du genre, le film se prend encore des retours parfois négatifs, même si assez rares - mauvaise retranscription du manga (même si réalisée par son auteur lui même) ? Violence trop forte ? Il est certain que découvrir Akira aujourd'hui sans en connaître l'impact culturel peut s'avérer déroutant, malgré qu'il soit pourtant évident que le film procure des sensations uniques. Dans tous les cas, il est impossible de passer à côté d'une telle oeuvre, tant son tracé dans l'histoire du cinéma est aujourd'hui bien profond et peut s'octroyer sans peine le statut d'indispensable, voir de classique.
Probablement l'une des plus grandes révolutions dans le domaine de l'animation jamais réalisée, Akira est une expérience assez incroyable - maintes fois copié depuis, mais jamais égalé. Le film d'Ôtomo se vit comme si il était réel, on en ressort à la fois bouleversé et éveillé, Je suis Tetsuo, comme dirait l'autre, et on veut bien le croire. Sans aucune hésitation, Akira s'ajoute à la liste des trois ou quatre films que j'aimerai voir en salles un jour ou l'autre, tant le fait de le voir sur un petit écran me retourne complètement, et que j'ose à peine imaginer le choc qu'il pourrait être au cinéma. Un chef d'oeuvre comme on en fait pas des masses.
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