Réalisé par Ben Wheatley (2013)
Avec Julian Barratt, Michael Smiley, Reece Shearsmith, Peter Ferdinando
Il y a un an sortait sur nos écrans français le coup de maître Kill List - deuxième film d'un cinéaste qui depuis s'est forgé une réputation que certains mettent une vie à obtenir : Ben Wheatley, qui entre sa participation remarquée à The ABC of Death et son Touristes, sorti en décembre dernier, a sut se faire rapidement une place d'honneur dans le cœur des amateurs de films multi-genres et d'horreur à "ambiance". Kill List en était l'exemple parfait : démarrant comme un simple film de mœurs, se développant ensuite en film d'espionnage avant de se terminer en thriller horrifique terrifiant, il faut dire que cette petite production sortie de nulle part avait fortement marqué les esprits. A Field in England est donc le nouveau film du réalisateur : tourné en une dizaine de jours avec très peu de moyens, intégralement en noir et blanc avec six acteurs en tout et pour tout, on était en droit de se demander ce que nous préparait Wheatler - d'autant plus que la bande-annonce était alléchante.
Et puis merde. J'avais été complètement subjugué par Kill List, et A Field in England divisera autant la critique que les précédents films de Wheatley. Mais moi j'adore. Je sais pas, je dis peut-être ça dans le vent, peut-être que je suis complètement à côté de la plaque, mais je pense que Wheatley est le nouveau Kubrick - oui, ça peut paraître osé, excessif, mais on retrouve tant de trucs similaires entre les deux réalisateurs : des films qui divisent énormément, mais pourtant hyper novateurs sur tous les plans, à la mise en scène virtuose qui joue énormément aussi sur la bande-sonore et sur des effets de styles assez unique (ici on a un montage complètement épileptique en "images subliminales" de près de trois minutes, un long plan ralenti d'un homme qui marche pendant autant de temps...) mais qui sont maîtrisés et dans l'atmosphère du reste du métrage.
Mais bon, Kubrick est devenu ce qu'il est bien après ses films (et à chaque nouveau film il se faisait à nouveau démonter), et pour savoir si Wheatley fera de même, on va devoir attendre une paire d'année. Quoi qu'il en soit, je suis une nouvelle fois sous le choc. A Field in England, pourtant tourné en un laps de temps ridicule, est tout bonnement exceptionnel : la photographie, la recherche visuelle impressionnante alors que c'est en noir et blanc, un montage/mixage sonore aux quatre épingles qui permet de déranger le spectateur tout le long. On passe d'une espèce de mixe étrange de film historique et de comédie, à un thriller angoissant à l'atmosphère tordue et malsaine.
Un casting de haute volée est ici là pour soutenir un film qui vole déjà très haut avec sa mise en scène et sa bande-son super réussie. Et le scénario ? A vrai dire on s'en tape : A Field in England c'est un film d'ambiance, et ce scénar à base de déserteurs et de champignons hallucinogènes, même s'il est très simple sur le papier et que finalement, passé la première heure, on en a plus vraiment rien à faire, finalement n'est ici que pour soutenir une beauté plastique et une réelle atmosphère qui parvient à faire quelque chose que très peu de films réussissent : faire ressentir quelque chose, chahuter. Un film qui joue avec la perception émotionnelle du spectateur sans arrêt. Et même si la fin du film est légèrement moins marquante que celle de son Kill List, les dix dernières minutes qu'a donné Ben Wheatley à son A Field in England sont géniales elles aussi (surtout qu'il était difficile de donner une fin à un tel film).
Dans tous les cas, A Field in England est une belle claque. Un film qui divisera, c'est certain, et beaucoup de ceux qui me liront diront sans doute que c'est un "navet". Mais le nouveau Wheatley a réussi à me faire ressentir presque autant de choses que Kill List, et c'était pas gagné. J'adore ce type, j'adore ces films, et j'en veux plus. Probablement l'un des meilleurs espoirs du cinéma contemporain.
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